Équipement technologique et diffusion des outils dans les collectivités locales bretonnes Les premiers résultats du baromètre Communes et TIC

, par Jocelyne Trémenbert, Nicolas Jullien

Les premiers résultats du baromètre Communes et TIC 2007 : équipement.

Pour sa troisième édition, le baromètre communes et TIC de M@rsouin, propose un focus sur les équipements, les usages et attentes des municipalités bretonnes en matière de technologies de l’information. Nous avons essayé de mesurer divers indicateurs de l’effort des communes dans ce domaine et tenté d’identifier les facteurs déterminants de réussite des services TIC déployés.

Objectifs.

Cette enquête est la troisième édition (après 2003 et 2005) d’une étude adressée à l’ensemble des administrations communales (ou mairies) de Bretagne, soit environ 1300 communes.

L’objectif de ces enquêtes est de suivre l’équipement de ces administrations en TIC (Technologies de l’Information et de la Communication), mais aussi la diffusion de ces outils dans les pratiques de ces administrations, qui ont une double particularité, par rapport à d’autres organisations :

elles regroupent des professionnels (les employés communaux), à qui on peut demander de se former, et des non-professionnels, pour ne pas dire des bénévoles (les élus) ;

elles rendent un certain nombre de services (administration, gestion des écoles...), mais sont aussi souvent contraintes dans la façon de rendre ces services par des « donneurs d’ordres » (communautés de communes, État), qui formatent l’information ou imposent des pratiques informationnelles (usage du courrier électronique avec les communautés de communes, dématérialisation des procédures avec l’État).

D’autre part, il n’existe pas d’enquête nationale sur le sujet, et que de rares enquêtes régionales (en Aquitaine, notamment). Les comparaisons internationales sont aussi difficiles, car, évidement, la taille de la population communale joue sur la taille de l’administration communale (autour d’un employé pour cent habitants en Bretagne) et dans les autres pays, les communes ont été regroupées et sont plus grosses (en Wallonie depuis 1977 il n’y a plus que 262 communes).

Notre objectif, dans cette enquête, était donc essentiellement régional, même si nous pensons que la Bretagne est assez représentative de la situation française. Nous avons cherché, au delà de la mesure de l’évolution des taux d’équipement, une représentation de la réalité des usages des TIC dans la gouvernance locale.

Nos hypothèses étaient qu’en plus des déterminants « classiques » de l’appétence pour les TIC, taille de la commune, appartenance à une aire urbaine, commune touristique, commune riche, pression/offre des partenaires, les différences s’expliquaient par des facteurs humains :

 âge des employés, du maire et des adjoints,

 intérêt du responsable des services pour les TIC,

 existence d’un élément moteur (employé responsable des TIC, animateur de l’espace public d’accès à Internet)...

Surtout, que dans les petites communes, les TIC ne sont pas forcément le meilleur media. Il n’y a pas toujours d’agents administratifs pour traiter les courriels, l’équipe municipale est le premier interlocuteur public et est souvent très accessible « en direct », etc.

Ainsi après avoir rappelé les objectifs de cette enquête , dans une première partie rapide, nous présenterons la démarche méthodologique adoptée. Dans une seconde partie, nous présenterons le paysage des communes bretonnes tout en tentant de faire émerger les déterminants qui conditionnent l’équipement en ordinateurs, connexions et logiciels. Et enfin dans la dernière partie, nous présenterons l’état des équipements.

Démarche.

La méthodologie adoptée pour cette troisième édition est assez similaire à celle de la seconde édition. L’article « Exposé sur la méthodologie de l’enquête auprès des "Communes" » sur le site de M@rsouin en rappelle les différentes caractéristiques et phases :

 la phase préalable

C’est dans cette phase que nous élaborons le questionnaire. Nous avons bénéficié du soutien d’élus, de secrétaires généraux et de professionnels [1] dont les compétences et les réflexions ont été d’une aide précieuse pour l’orientation des travaux et que nous souhaitons remercier ici.

 la phase de collecte, entre novembre 2007 et janvier 2008.

Des courriers papier ont été adressés à toutes les communes, avec le questionnaire (de quatre pages) et un courrier présentant l’enquête et ses objectifs.

C’est dans cette phase que nous gérons le suivi des quotas et le biais que peut engendrer des relances. Cette phase s’est déroulée de la même façon qu’en 2005, à deux points près. Cette fois-ci, nous avons précisé dans la lettre accompagnant le questionnaire qu’il était plutôt à remplir par la personne responsable des services administratifs de la commune (DGS, secrétaire général, sinon Maire ou secrétaire administratif). Ceci peut-il expliquer le plus faible taux de retour : 38% cette année, contre 48% il y a deux ans, le/la DGS ou la/le secrétaire de mairie ne se sentant pas missionné par le maire ? La période, pré-électorale n’était peut-être pas propice. Le fait qu’il s’agit de la même équipe municipale qu’il y a deux ans et donc le sentiment d’avoir déjà répondu semble exclus car nous avons eu le même taux de réponses parmi les répondants 2005 que parmi les non-répondants.

D’autre part, les relances se sont faites quasi exclusivement par courrier électronique, la quasi totalité des collectivités étant équipée cette année [2]. Notons déjà à ce stade que contrairement à il y a 2 ans, les adresses mails se sont avérées valides et les mairies semblent davantage les utiliser. Notons aussi que le taux de réponses en ligne a été bien supérieur à celui de 2005 (29% contre 9%).

Le graphique suivant fournit le profil des communes participants. Rappelons qu’il est très peu différent de la réelle représentativité de la répartition communale par département et taille de commune [3].

Précisons également qu’au cours de cette étape 72% des répondants on laissé leur mail pour obtenir les résultats ultérieurement.

 la phase d’enrichissement de la base de données collectées avec des données extérieures similaires à celles de 2005 (découpage en unités urbaines (et leur taille), en pays, en intercommunalités, indicateur de richesse de la commune, adresses des sites communaux et intercommunaux)

 la phase d’analyse, dont les résultats sont présentés dans cet article et les suivants.

Profil des communes.

La Région Bretagne compte un peu moins de 1300 communes, du petit village rural à la métropole régionale. Si en nombre les communes sont assez bien réparties au sein des 4 départements (28% des communes en Côtes d’Armor, 27% en Ille et Vilaine, 23% en Finistère, 22% en Morbihan), le tableau suivant rappelle que les départements ne présentent pas forcément tous les mêmes caractéristiques en terme de répartition selon la taille, par exemple.

Taux de communes de moins de 1000 habitants Taux de communes de 1000 habitants à moins de 2000 habitants Taux de communes de 2000 à moins de 5000 habitants Taux de communes de 5000 habitants et plus Taux de communes rurales
Côtes d’Armor 61% 21% 14% 4% 82%
Finistère 40% 24% 26% 11% 71%
Ille et Vilaine 51% 24% 17% 8% 83%
Morbihan 40% 28% 24% 8% 79%
Total Région Bretagne 49% 24% 20% 7% 79%

En Bretagne, presque une commune sur deux [4] était composée de moins de 1000 habitants et 7,4% avaient plus de 5000 habitants. C’est dans les Côtes d’Armor que le taux de communes de moins de 1000 habitants est le plus fort avec 61% , alors qu’en Finistère ou Morbihan il n’y en a que 40%. De plus en Bretagne, 79% des communes sont dites rurales, c’est-à-dire n’appartenant pas à une unité urbaine.

Malgré ces disparités de population, auxquelles on peut rajouter des disparités de densités et de superficies, toutes les communes possèdent la même structure administrative. La commune est administrée par un conseil municipal, qui lui-même élit en son sein le maire. Le nombre de conseillers varie (en fonction de la population de la commune). Des agents, administratifs ou techniques sont chargés de rendre les services administratifs fournit par la mairie et de mettre en œuvre les politiques du conseil municipal. Le secrétaire général ou directeur général des services, plus haut représentant des administratifs, quand il y en a un, se positionne entre ces deux catégories, à mi-chemin entre le politique et l’opérationnel. Ainsi, la politique TIC d’une commune (équipement en informatique, création d’une cybercommune, site Web) est décidée par les conseillers et le maire et l’appropriation de ces outils et leur réelle utilisation dans les services rendus aux administrés dépend du personnel administratif .

D’après les secrétaires généraux et secrétaires de mairie (voir diagramme circulaire suivant), au moins un maire sur deux est utilisateur d’Internet que ce soit chez lui, à la mairie ou ailleurs. Quand on sait que pour plus de 8 mairies sur 10 (ayant répondu), le maire est âgé de 50 ans ou plus, cette proportion d’utilisateurs est importante (elle n’est par exemple que de un sur trois pour l’ensemble des individus âgés de 50 ans et plus selon la dernière enquête régionale de M@rsouin). Cependant, cela signifie aussi qu’un maire sur deux ne profite pas des nombreuses opportunités d’Internet. De plus, le taux de répondants « ne sachant pas » est non négligeable (13%) ; il reflète assez bien le fait que les échanges se font par Internet si le maire ou les élus le proposent ; les secrétaires généraux n’ont pas de réelle connaissance de qui, parmi les élus, est connecté à son domicile, ou sur son lieu de travail.

Toutes les communes possèdent aussi les mêmes compétences légales. Leurs missions vont de l’administration locale (eau, permis de construire ...) au pouvoir de police (pour le maire), en passant par la charge des actes d’état civil, le développement économique et social, l’aménagement du territoire .... L’enseignement maternel et primaire (hors les professeurs des écoles) est aussi une compétence municipale. Ce sont donc ces dernières qui équipent leurs écoles en ordinateurs et connexions à Internet. Notons toutefois que la formation des enseignants à l’usage des technologies dépend elle de l’Education Nationale. La frontière n’est donc pas toujours très claire et il en est ainsi de nombreuses compétences réparties entre communes, intercommunalités, conseils généraux, pays, voire départements.

Les missions sont donc les mêmes, même si elles ne sont pas assurées également, mais le graphique suivant nous montre que les ressources dont disposent les mairies, qui ont répondu à l’enquête, pour la mise en œuvre des TIC sont très variables. Peu de communes, que ce soit au niveau des agents ou au niveau des élus, ont un référent TIC et 48% déclarent n’avoir aucune ressource en interne.

Lorsqu’on leur demande « Qui représente plutôt l’élément moteur de l’usage des TIC ? », elles sont 29% à déclarer qu’il n’y en a pas, 41% à citer le secrétaire général ou DGS, 15% le maire, 17% un adjoint et 18% une autre personne (animateur de point d’accès public, agent technophile ...)

L’environnement économique des communes est aussi à prendre en compte dans l’analyse de leur rapport aux technologies. Nous n’avons pas pu rattaché à notre enquête d’informations concernant par exemple le nombre d’entreprises implantées et leur secteur d’activité, le nombre d’écoles, le niveau éducationnel de la population (taux de chômeurs, de retraités, catégories socioprofessionnelles ...) Par contre, deux indicateurs, venant compléter le profil, nous serviront aussi par la suite de déterminants :

si la commune se considère comme « touristique » (possédant une politique locale du tourisme, des capacités d’hébergement pour non résidents, des curiosités naturelles ou historiques, une situation géographique spécifique ...). 31% de notre échantillon a répondu positivement à cette question,

le niveau de revenu moyen de la population, calculé en effectuant le rapport entre revenus imposables de l’ensemble des foyers fiscaux et nombre de foyers fiscaux.

Ce dernier indicateur exprime un niveau de richesse, qui aurait été plus proche de la réalité si nous avions eu accès aux chiffres de l’ensemble des impôts directs locaux (taxes foncières, d’habitation et professionnelles).

Comme l’immense majorité des communes compte moins de 2000 habitants (73% pour la Bretagne), et parce que le législateur les y a incités (notamment via la dotation de l’État), les communes ont tendance à s’associer. En Bretagne, 98% des communes [5] appartiennent à une structure intercommunale (communautés urbaines, les communautés d’agglomérations, ou, le plus courant, communauté de communes). Les communes ont donc transféré certaines compétences aux structures intercommunales. Les attributions qui leur sont confiées sont généralement la collecte et le traitement des ordures ménagères ainsi que l’adduction d’eau courante. Les communes suburbaines s’associent aussi souvent avec la ville centre pour la gestion des transports publics et la gestion des impôts locaux. Il est clair que ces forces d’agglomérations influencent l’implication des collectivités locales dans le développement des TIC sur leur territoire. Certaines intercommunalités ont défini des compétences facultatives autour du développement des TIC. Ces projets ont souvent des champs d’action axés autour :

du développement de l’équipement du territoire en infrastructures numériques permettant alors l’émergence d’une offre alternative ou palliant l’absence d’opérateurs de télécommunications (couverture de zones blanches, liaisons Internet fibre optique, bornes Wi-FI, réseau WiMax ...),

de services en direction des citoyens / usagers, du monde économique (lieux d’accès à Internet pour le public du type cybercommunes, sites Web intercommunaux, portail de promotion touristique, mise à disposition de ressources du type services de visio-conférence...) ,

de la modernisation de la gestion communale et intercommunale (intranet, systèmes d’information géographique, numérisation des cadastres, formation des agents ...).

Mais ces mutualisations sont-elles mises en place simplement pour réduire les coûts, ou ont-elles pour but aussi de développer les usages ?

Dans notre enquête, 46% des mairies déclarent que leur intercommunalité a mis en place des projets liés aux TIC et 37% déclarent qu’il y a des projets en-cours.

Les initiatives existent aussi :

 au niveau du pays, citons le Pays de Brest très actif dans ce domaine avec son projet « Internet et multimédia en pays de Brest, usages innovants et lien social sur les territoires » [6] dont la première étape a été de mettre en place un entre de Ressources Coopératif Multimédia en Pays de Brest autour des cybercommunes et des points d’accès public à Internet et au Multimédia,

 au niveau de la région, avec Mégalis Bretagne qui représente l’action engagée par les collectivités locales en faveur du développement des TIC au service des communautés d’intérêt public (essentiellement, aujourd’hui, autour de la e-administration, avec, par exemple, sa plateforme régionale de marchés publics électroniques, ou l’accord avec l’Adullact pour la diffusion de logiciels (libres) spécifiques aux métiers des communes),

 13% de nous répondants déclarent adhérer à des projets liés aux technologies de l’information menés en dehors de la commune et de l’intercommunalité.

En guise de conclusion de ce paysage breton précisant quelques indicateurs du degré d’importance accordée aux TIC dans la politique globale des communes, soulignons que la grande majorité des communes estiment leur investissement dans les TIC dans la moyenne (rapporté à la taille de leur commune).

Équipements.

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Une connexion généralisée mais pas à l’ensemble du personnel

Pour rappel, dans notre précédente édition (données de fin 2005), toutes les mairies sauf une étaient informatisées et 95% étaient connectées à Internet, avec une hausse de plus de 8 points par rapport à 2003. Toutes les mairies qui avaient déclaré ne pas être connectées le sont aujourd’hui. Par contre, reste parmi les maries de notre échantillon de répondants 2007 une seule non reliée.

L’évolution majeure s’est faite sur la connexion permanente : seules, en 2007, 1,5% des communes se contentent d’un accès à bas débit (contre 37% 2005).

Cette forte connexion pourtant ne signifie pas que n’importe qui au sein de la mairie a la possibilité de naviguer sur Internet, recevoir des courriers électroniques, se connecter sur un Intranet ... bref, d’utiliser les nombreuses opportunités d’Internet.

Selon le graphique suivant, si 90% des communes ont équipé la totalité de leur personnel administratif d’ordinateur, 87% leur donnent aussi un accès Internet mais seulement 44% une adresse e-mail attitrée. Toutefois la progression depuis 2005 est forte : seulement 50% des communes avaient équipé la totalité du personnel administratif en ordinateur.

Quant aux agents techniques, les cas sont variés. Certaines communes les équipent de solutions mobiles (de l’ordinateur portable à l’assistant numérique, en passant par des téléphones mobiles aux multiples fonctionnalités) quant d’autres leur proposent un accès partagé sur un ordinateur, voire, souvent, aucun accès, estimant sans doute que leurs métiers ne le nécessitent pas.

Si l’on passe en revue les équipements des maires, 33% ont un ordinateur au sein de l’administration communale (et un accès Internet), 22% une adresse e-mail propre, 23% un téléphone mobile professionnel attitré, 5% un outil nomade.

Comme le montre le graphique suivant, le cas des adjoints est relativement proche du personnel technique.

Précisons que ces faibles proportions ne signifient pas pour autant que les adjoints n’utilisent pas les technologies pour assurer leurs missions. Ils peuvent très bien y accéder de leur domicile, de leur lieu de travail ou même d’un espace public numérique ou de chez des amis, voisins, enfants ... Nous verrons dans la partie usage que dans une commune sur trois les services administratifs, y compris le secrétaire général bien sûr, utilisent par exemple la messagerie électronique pour communiquer avec les adjoints, du moins une partie des adjoints.

Un équipement très diversifié au niveau des solutions informatiques

Comme le montre le tableau suivant, les mairies utilisent beaucoup les solutions informatiques dans la gestion communale. Ces solutions sont le plus souvent des logiciels spécialisés du marché (comme Magnus, JVS ou Cegilog). Cependant certaines mairies utilisent simplement les tableurs et traitements de textes pour gérer les listes d’administrés, faire les feuilles de paye ... Notons également que ces diverses solutions peuvent appartenir à la commune ou être mutualisées avec leur intercommunalité par exemple. Ainsi 16% de l’échantillon utilise au moins un logiciel mutualisé.

Non concernés [7] Non équipés Équipés (solution dédiée, mutualisée, propre) Équipés (solution dédiée, mutualisée) Taux 2005
Comptabilité et finances 0% 1% 99% 81% 99%
Ressources humaines (paye) 5% 15% 80% 65% 39%
Services techniques (réservations, travaux ...) 17% 56% 27% 12% 8%
Urbanisme (cadastre, cimetière ...) 2% 15% 83% 69% 64%
Activités enfance (facturation cantine, CLSH ...) 24% 15% 61% 44% 32%
Gestion de la population (listes, recensement ...) 3% 21% 76% 59%
État civil 2% 17% 81% 62% 68%
Gestion des élections 1% 3% 96% 78% 90%
Gestion des appels d’offres 8% 63% 29% 12% 10%
Gestion des courriers (postaux, électroniques ...) 8% 46% 46% 17%
Publication de documents administratifs 7% 49% 44% 14%

Les 3 fonctions les plus informatisées, en terme de part des communes informatisées, sont la comptabilité et les finances (99%), la gestion des élections (96%) et l’urbanisme (83%). La gestion financière avec les préparations et simulations budgétaires, la gestion des biens, le suivi pluriannuel des opérations a sûrement été historiquement aussi la première fonction informatisée. Il n’est pas étonnant de retrouver la gestion des élections en seconde position car certains éditeurs la proposent aussi dans le pack de base, et que cela fait partie des compétences que les communes peuvent difficilement déléguer. L’urbanisme ou gestion du territoire recouvre aussi bien la gestion des déclarations de travaux, permis de construire que celle des demandes de certificat d’urbanisme, des dates d’échéances des concessions dans les cimetières ... Nous verrons dans l’article sur les usages que la numérisation du cadastre (effectuée par les services du cadastre, les communes ou leur intercommunalité), par rapport à de simples plans, permet de travailler par exemple par index (propriétés bâties, non bâties, taxes d’habitation ...), de faire des recherches (noms de propriétaire, parcelles ...), des zooms.

En quatrième position, on retrouve les ressources humaines avec même certains logiciels qui vont jusqu’à gérer les liaisons avec la Trésorerie pour transmettre par exemple les ordres de virement de salaire.

46% des communes déclarent gérer avec des moyens informatiques leurs courriers, qu’ils soient papier ou électroniques. Cela ne veut pas dire pour autant par exemple qu’elles utilisent une seule adresse générale pour les courriers électroniques, que les mails arrivants sont ensuite dispatchés au bon interlocuteur et qu’il existe une plateforme de mise en commun de l’information permettant également une certaine traçabilité.

Moins d’une mairie sur deux (44%) déclare utiliser des solutions informatiques quant à la publication des documents administratifs. Pourtant, il existe des logiciels qui proposent un catalogue de fonds de pages remplaçant les multiples documents, internes ou à usage externe (telles convocations, certificats, bordereaux de pièces ...) et les formulaires administratifs couramment utilisés. Les documents peuvent alors être saisis à l’écran, personnalisés si besoin, et archivés dans des bases de données facilement interrogeables.

L’enquête nous apprend aussi que 27% des communes (voir graphique suivant) utilisent des logiciels libres ou open sources, qu’ils soient adaptés à la gestion des collectivités ou plus généraux comme par exemple ceux du CD bureau libre [8] distribués par les mairies du pays de Brest.


Les logiciels de Système d’Information Géographique (SIG) [9] s’étendent dans les mairies

Autre information intéressante, en 2005, 37% des mairies déclaraient être équipées d’un logiciel de Système d’Information Géographique, elles sont maintenant 54%. Ils permettent en effet de coupler des données géographiques très précises, à partir du cadastre numérisé, et des bases de données variées. Il est ainsi possible d’accéder en temps réel à tous les réseaux du territoire (eau, assainissement, électricité...), mais aussi par exemple aux ressources patrimoniales. 30% des mairies équipées le sont via leur intercommunalité.

Ceci étant, ce n’est pas parce qu’une mairie est équipée d’un logiciel SIG (de son propre chef ou par son intercommunalité) que ce dernier est utilisé, ou même que les nombreuses fonctionnalités sont exploitées au mieux. Dans la précédente édition, les mairies étaient nombreuses à se déclarer équipées mais non utilisatrices.

Le cas des équipements en certificats électroniques

11% des mairies seraient dotées de certificats électroniques. Ces derniers, sortes de cartes d’identité numériques dont l’objet est d’identifier une entité physique (la commune équipée). Une autorité de certification fait office de tiers de confiance et atteste du lien entre l’identité physique et l’entité numérique et ce certificat peut être utilisé comme signature engageant la commune. Cette signature se trouve sur une carte à puce qui doit être connectée à l’ordinateur pour chaque document à signer. Le document est ensuite placé dans un « parapheur électronique », et la ou les personne(s) désignée(s) peuvent ainsi y accéder pour procéder à l’envoi.

Ces certificats sont principalement utilisés dans la gestion des relations entre collectivités territoriales ou entre collectivité territoriale et Etat, mais aussi, parfois, avec les fournisseurs et les citoyens.

Ils évitent des frais de postage, les délais de délivrance sont raccourcis et l’identification des destinataires et émetteurs des demandes est validée à chaque étape. Ils servent par exemple dans les processus de télétransmission des mentions marginales de l’Etat Civil entre les mairies. Ainsi, les services Etat Civil échangent des informations numérisées et sécurisées pour la mise à jour des actes. Ils peuvent aussi intervenir au niveau du contrôle de la légalité : les comptes-rendus des conseils municipaux et les délibérations sont alors signés et envoyés électroniquement par la Mairie à la Préfecture ou à la Sous-Préfecture. Plusieurs personnes au sein de la mairie peuvent bénéficier de la signature électronique pour l’envoi de documents légaux.

Dans notre enquête, 8% de maires, 4% des directeurs généraux des services et quelques élus possèdent un tel certificat.

Peut-on vraiment parler d’un effet taille au niveau de l’équipement ?

L’allure du graphique suivant résultant d’une analyse des correspondances multiples [10] sur les variables d’équipement (en rouge) avec en illustratif toutes les caractéristiques des communes (en gris) nous indique 4 grands types de communes.

Au centre, on retrouve les communes avec un équipement informatique partiel. Dans le coin supérieur gauche, ce sont les communes pour lesquelles une partie seulement des adjoints a des accès informatiques. A droite, il s’agit de communes peu ou pas équipées, toutes catégories d’« acteurs communaux » confondues. Rien dans leur profil ne caractérise ou ne discrimine vraiment ces 3 types, parmi toutes les caractéristiques des communes prises en compte dans l’étude et évoquées ci-dessus (caractéristiques économiques, moyens humains et moyens TIC).

Par contre, dans la partie inférieure gauche, on retrouve les communes qui ont la particularité d’avoir un maire et tous ses adjoints équipés. On constate que c’est surtout le cas des communes de plus de 3500 habitants, qui sont aussi des communes urbaines.

Les différences observées au niveau équipement semblent donc être plus liées à la taille, nous verrons par la suite que les différences de moyens humains et moyens TIC interviennent davantage au niveau de la diffusion des usages.

Conclusion

Les collectivités locales sont au cœur des enjeux du développement de la Société de l’Information, étant aussi bien utilisatrices de nouvelles technologies, comme nous venons de le voir dans ce premier article sur leur équipement, que créatrices et accompagnatrices comme nous le verrons dans les articles suivants développant leurs usages et leurs attentes.

Il est certain que les rythmes sont différents aussi bien au niveau de l’équipement que de l’appropriation. Paradoxalement, les communes rurales semblent moins bien équipées que les communes urbaines. Elles pourraient pourtant, grâce à un équipement adéquat et un usage développé des nouvelles technologies, bénéficier d’actions qu’elles n’auraient pas pu mettre en place toutes seules, mieux gérer le temps et les besoins en agents territoriaux, augmenter l’efficacité de leur organisation interne. Certaines le font via leur intercommunalité. Mais si elles restent en marge de la diffusion des TIC et de leurs usages, c’est sûrement par besoin d’appui pédagogique et technique, voire par besoin de sensibilisation ou tout simplement suite à un problème de priorités au niveau des dossiers à traiter. Rares sont les communes où le personnel, le DGS, le maire ou les élus sont peu favorables à l’informatisation de leur travail au quotidien, moins de 3% selon l’enquête, même si on assiste à une modification de leurs compétences pour assurer leurs diverses missions.

Enfin pour conclure, le facteur taille joue certes une grande part dans l’équipement et la diffusion des outils mais c’est sans compter d’autres obstacles de taille comme les moyens humains et technologiques.

Prochain article : un point sur les services et usages des TIC dans l’administration locale bretonne.

Notes

[1Notamment du Conseil Régional de Bretagne, de Mégalis, de l’AMF section Finistère, de la ville de Brest mais aussi du mastère MITIC de Marne la Vallée.

[2Nous avons relancé quelques communes par téléphone, soit parce qu’elles étaient importantes pour des questions de représentativité de l’échantillon, soit parce qu’elles n’avaient pas Internet en 2005 et que nous voulions nous assurer de leur connexion. Dans tous les cas (sauf un), quand elles acceptaient de répondre, le questionnaire leur a été renvoyé par courrier électronique.

[3Sauf mention contraire, tous les chiffres concernant l’enquête donnés dans la suite de l’article sont corrigés par un léger redressement qui permet d’extrapoler les résultats obtenus sur l’échantillon à l’ensemble des communes bretonnes.

[4D’après le dernier recensement de 1999. C’est le dernier recensement concernant toute la population en même temps. La première publication de la population légale du nouveau recensement, pour chaque commune et chaque circonscription administrative ne sera disponible que fin 2008.

[5La grande majorité des villes insulaires n’a pas rejoint d’intercommunalité.

[7« Une solution ne présenterait aucune utilité pour la mairie ». Cette possibilité était laissée car rappelons que toutes les communes n’ont pas forcément par exemple une ou plusieurs écoles.

[9Selon Françoise Gourmelon, géographe au sein du laboratoire Géomer (UBO), « bien plus que de simples outils de traitement de données géographiques, les SIG proposent une méthode de modélisation du monde réel fondée sur quatre composantes : matérielle, logicielle, informationnelle et institutionnelle ».

[10Il s’agit d’une technique statistique d’analyse des données utilisée pour synthétiser et expliquer l’information donnée par plusieurs variables. Elle permet de résumer ces variables en minimisant la déperdition d’information et d’observer les éventuels liens ou proximités entre ces variables.